Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Généalogie à la Désirade (Guadeloupe)

Les LOURI

Le 6 mars 1871 à la Désirade, la naissance de Nestor LOURI est déclarée par Lusine FRANCHIPANE, veuve Jean Noël, 70 ans, propriétaire, laquelle était présente à l'accouchement. L'enfant est né le 26 février en la maison des héritiers RUILLIER, sise au bourg de la Grand'Anse, fils d'Henriette LOURI, âgée de 24 ans, cultivatrice, domiciliée en la commune. Un des témoins est Honoré Saint-Clair RUILLIER (1818-1892), propriétaire. 

C'est le seul acte au nom LOURI enregistré dans l'état civil de l'île au dix-neuvième siècle. C'est à Pointe-à-Pitre que  je retrouve la trace de Nestor LOURI, marin, domicilié dans la ville, qui déclare le 6 octobre 1902 la naissance de sa fille naturelle Marie Sidonie Charlésine LOURI, issue de sa relation avec la demoiselle Edithe Alexine SAINT-JEAN. Née le 24 août 1902, l'enfant meurt le 7 octobre de la même année.

A la date du 20 avril 1892, toujours à Pointe-à-Pitre, je trouve l'acte de décès de la demoiselle Annicette LOURI, âgée d'environ 47 ans, sans profession, domiciliée en cette ville où elle est née de parents inconnus. Elle est décédée le même jour à l'Hôtel-Dieu où elle était entrée le 31 mars. Les déclarants sont l'économe et l'infirmier de l'établissement. 

Annicette LOURI avait donné naissance à Pointe-à-Pitre à un fils naturel, Léon Edmond LOURI, le 16 mai 1864, dans la maison de la dame veuve Moïse GIRAUD, rue de la Source, où elle demeurait passagèrement. Elle est dite âgée de 19 ans, cultivatrice, domiciliée à la Désirade.

La déclaration est fait par le sieur Edmond, 45 ans, capitaine au cabotage, lequel a assisté à l'accouchement. Les témoins sont Antoine VANGOUT, 38 ans, et Honoré TRAJAT, 32 ans, tous deux capitaines au cabotage. Le premier natif de la Désirade (mais s'étant marié et vivant à Pointe-à-Pitre) et l'autre des Saintes. 

Le sieur Edmond pourrait se confondre avec Edmond, voilier, âgé de 58 ans, né et domicilié à Pointe-à-Pitre et y décédé célibataire le 22 septembre 1880 à l'hospice Saint-Jules où il était entré le 4 août. 

Léon Edmond LOURI est décédé le 6 septembre 1865 à Pointe-à-Pitre, maison du sieur CHALLIET, "rue Dubouchage où demeure passagèrement la mère". Annicette LOURI est dite âgée de 20 ans, cultivatrice, domiciliée à la Désirade. 

Annicette LOURI a été la compagne de Janvier ZODIA, marin, nouveau libre de la Désirade, y né le 24 janvier 1843. Ils ont eu au moins quatre enfants ensemble : Lucienne ZODIA (1867-1876), Jeannine Amélie ZODIA (1870), Jean ZODIA (1873-1881) et Rosélie ZODIA (1878-1879). 

Dans tous ces actes, Annicette LOURI est dite servante. D'abord dite domiciliée à la Désirade et demeurant passagèrement à Pointe-à-Pitre, elle y est dite domiciliée  à partir de 1873 et Janvier ZODIA à partir de 1874. Ce dernier est décédé, journalier, à Pointe-à-Pitre le 12 septembre 1880. Le 14 février 1883, Annicette LOURI  donne naissance à des jumeaux, Octave et Octavie LOURI (décédée le 8 avril 1883). 

Comme Henriette LOURI, née vers 1847, Annicette LOURI, née vers 1845, a habité la Désirade puisqu'elle y est domiciliée. Même patronyme, même profession, même génération, mêmes lieux de résidence (la Désirade et Pointe-à-Pitre), je suis donc tenté d'en faire deux soeurs.

Elles ne figurent pas parmi les nouveaux libres de la Désirade. Je ne les trouvais initialement pas plus sur la base Anchoukaj, que ce soit à Pointe-à-Pitre ou ailleurs. Elles n'ont pourtant pas été affranchies. J'ai donc repris la recherche, ce qui m'a permis de trouver leur probable inscription sur le registre des nouveaux libres de Pointe-à-Pitre à la date du 20 avril 1855, malgré une altération du nom. 

3435 Henriette née et demeurant en cette ville, âgée de douze ans, Sans profession précédemment immatriculée Sous le N° 5474.
3436 Anicette née et demeurant en cette ville, âgée de dix ans, Sans profession, précédemment immatriculée Sous le N° 5975.
auxquelles Henriette & Anicette, Soeurs de parents inconnus, nous avons donné le nom patronimique de Louisi. 

Il y aurait eu soit une erreur de transcription si le patronyme initialement attribué était effectivement LOURI soit une transformation entre l'attribution en 1853 et le premier acte d'état civil à ce nom en 1864. J'opterai pour la première solution car le passage de LOUISI à LOURI ne me semble pas cohérent et peu en adéquation avec la prononciation créole.

En consultant le recensement nominative de la population de Pointe-à-Pitre de 1847, j'ai fini par retrouver les deux petites filles (en l'absence de relevé, c'est une recherche chronophage). Un numéro matricule est identique, le 5975, et l'autre présente une petite différence, 5974 au lieu de 5474 (il y a certainement eu une erreur mais dans quel document ?). Henriette et Anicette, âgées respectivement de 5 et 3 ans sont recensées parmi les esclaves d'une famille vivant au numéro 16 de la rue Sainte-Lucie

L'officier de l'état civil a rajouté plus tard sur le document, d'une autre encre (une encre violette), les patronymes attribués aux esclaves ainsi que le numéro de l'article concerné dans le registre des nouveaux libres. C'est le cas pour tous les esclaves, à l'exception des deux petites filles.

Pour elles, il n'y a que le nom, écrit avec la même encre noire employée lorsque la feuille du recensement a été initialement remplie. Ce patronyme est LOURI. Cette information indique que, dès le départ, elles avaient un (sur)nom.  Or le foyer dans lequel elles sont recensées est celui de Marie Françoise ROUÏL, c'est à dire que le nom qu'elles porteront est l'anagramme parfaite de celui de leur maîtresse.

Marie Françoise ROUÏL, marchande (avec une patente de 10e classe) a 29 ans et est mère de deux enfants naturels, Oscar Marcellin ROUÏL, 6 ans, et Marie Amélie ROUÏL, 4 ans. Elle est née libre le 30 janvier 1818 à Pointe-à-Pitre, fille de Jeanne Louise, 33 ans, "métive libre suivant sa patente de révision en date du vingt deux mai mil huit cent six sous le numéro 1749".

Sa naissance  y a été déclarée par sa mère le 16 avril 1818, en présence de  George ROUIL, 33 ans, marchand, qui "reconnait être le père comme provenant de sa cohabitation hors mariage avec la dite jeanne Louise". Les deux témoins sont deux marchands dont Jean Baptiste AUZIAS (Basse-Terre 1781 - Pointe-à-Pitre 1832) qui a pour mère Geneviève ROBIN, fille du commandant de la Désirade. 

Georges Victor ROUIL est blanc. Baptisé à Pointe-à-Pitre le 29 mars 1786 (il est né le 6 février), il est fils de Marcellin ROUIL, un Provençal, et Marie Françoise BOULAY (veuve de Pierre DIEULARD), créole de Saint-Vincent, mariés à Pointe-à-Pitre le 4 août 1783. Il meurt le 13 novembre 1833 sur l'habitation de la demoiselle Jeanne Louise sise au quartier des Abymes.

Marie Françoise ROUIL est au moins mère de Théodore Michel ROUIL, né le 2 mai 1836, d'Oscar Marcellin ROUIL, né le 29 mai 1842 (acte reconstitué le 24 mai 1843 suite au tremblement de terre de Pointe-à-Pitre du 28 février 1843), et de  Marie Amélie ROUIL, née le 7 mars 1844, tous les trois nés à Pointe-à-Pitre.

Le 6 juillet 1848, elle épouse aux Abymes Joseph Dieudonné ROMIL, 61 ans, sans profession, né et domicilié dans la commune des Abymes, fils de feue demoiselle Joséphine, ainsi qu'il est constaté par une enquête du 10 juin 1848. Les nouveaux époux légitiment leurs trois enfants.

[Bien que non recensé avec sa mère, l'aîné était donc en vie. Théodore Michel ROUIL puis ROMOUIL est mort, veuf de Marie Anne Toinette Irma Isida VICTOR, dans la maison de sa mère rue Sainte-Lucie le 12 novembre 1874.]

L'acte de mariage apprend que la mère de la future épouse est décédée le 28 décembre 1843 à Pointe-à-Pitre. L'acte concerne la demoiselle Jeanne Louise F(r)ançoise, âgée de 60 ans, sans profession, née à Marie-Galante. Les déclarants sont Jean Pierre Auguste CAPITAINE, 27 ans, négociant, et Jean DUPUY, 35 ans, sans profession, domiciliés aux Abymes. L'un ou l'autre ou les deux seraient ses fils, ce qui me laisse perplexe. Je pense à une erreur lors de la rédaction de l'acte.

[En complément, Pierre Auguste CAPITAINE, 27 ans, négociant, est témoin lors de la déclaration de la naissance de Marie Amélie ROUIL en 1844. Félix Léopold CAPITAINE, 35 ans, négociant, et Emile Alexandre CAPITAINE, son frère, 31 ans, aussi négociant sont présents pour la reconstitution de l'acte de naissance d'Oscar Marcellin ROUIL en 1843. Léopold Firmin CAPITAINE, 26 ans, marchand, fait la déclaration de la naissance de Théodore Michel ROUIL en 1836. Il y a donc bien un lien quelconque, cependant ces hommes semblent être des fils d'Alexandre Louis Firmin CAPITAINE, natif de Paris, et de Marie Gabriel Henriette HOUILLIER, mariés à Basse-Terre le 25 mai 1808, d'où des enfants nés à Basse-Terre dont Auguste et Léopold CAPITAINE, négociants à Pointe-à-Pitre.]

Joseph Dieudonné ROMIL meurt le 7 novembre 1850 au Gosier. Le 10 septembre 1851, très enceinte, Marie Françoise ROUIL, commerçante, se remarie à Pointe-à-Pitre avec Romuald, aussi commerçant, né dans cette ville le 7 février 1827, fils naturel de la demoiselle Juliette, sans profession, présentement absente de la colonie. Sa signature est la même que celle d'Eugène ROMUALD qui était témoin au mariage de Marie Françoise ROUIL en 1848.

Le 18 septembre 1851, il déclare la naissance de leur fille légitime Cécile Elmire ROMUALD, née deux jours après leur union. Elle est née rue Sainte-Lucie et y est décédée le 27 juin 1852. Les parents sont dits commerçants dans les deux actes.

Marie Françoise ROUIL est morte à Pointe-à-Pitre le 9 juin 1899, veuve en secondes noces du sieur Romuald.  Celui est décédé à Paris (9e arrondissement), rentier, le 3 janvier 1889 sous le nom d'Eugène ROMUALD, âgé de 62 ans et né à Pointe-à-Pitre. Il est dit fils de père et mère et époux de dame dont les prénoms et noms ne nous sont pas indiqués.

Il est mort en son domicile rue Baudin 24. Il résidait à Paris depuis un certain temps car il y figure à cette adresse dans un almanach de 1882 comme commissionnaire en marchandises. En fait, il demeure déjà à Paris en 1872 comme en atteste cette annonce de la formation d'une société pour l'exploitation de trois maisons de commerce en Guadeloupe (une à Basse-Terre, une à Pointe-à-Pitre et une au Moule).

Le 16 février 1874, Marie Françoise ROUIL est dite propriétaire demeurant à la Pointe-à-Pitre dans l'acte de mariage  à Rochefort de son fils Oscar Marcellin ROMOUIL à Rochefort. Capitaine adjudant major au 3e régiment d'infanterie de marine, il épouse Eugénie Anna BOURGUIGNON, fille et nièce de banquiers. Son dossier de chevalier de la Légion d'honneur indique qu'il est passé par l'école militaire de Saint-Cyr. 

Son frère Théodore Michel ROMOUIL, sans profession, s'était marié avec Marie Anne Toinette Irma Isida VICTOR le 21 septembre 1861 à Pointe-à-Pitre. Leur soeur Marie Amélie ROMOUIL y avait épousé Edouard VENTRILON, natif de Granville, capitaine au long cours, le 31 août 1864. Edouard VENTRILLON est décédé le 15 octobre 1886 à Pointe-à-Pitre tandis que sa veuve est morte à Lizy-sur -Ourcq (Seine-et-Marne) le 22 mars 1896. 

Je reviens sur l'origine de la famille ROUIL en Guadeloupe. Le premier du nom, Marcellin ROUIL est né et a été baptisé à Marseille, paroisse Saint-Ferreol, le 14 juin 1753 sous le nom de Victor Amédée Marcellin ROÜIT, fils de Marcellin ROÜIT et d'Elizabeth VERNE (BERNE dans d'autres actes). Leur mariage a été célébré dans la même paroisse le 8 mars 1750.

Marcellin ROÜIT est veuf et est dit âgé d'environ 60 ans. Il est fils de Jean ROUIT et de Madelaine LA LIEURE (ou variantes de lecture). Elizabeth BERNE a environ 24 ans et est fille de Léger BERNE et de Marie MARIÉ, de Barjols dans le diocèse de Fréjus. Elle réside à Marseille depuis son bas âge. Elle est née à Barjols le 20 avril 1726 et y a été baptisée le lendemain. Son père y était fouleur de draps.

Marcellin ROUIT est décédé le 30 juillet 1759 et inhumé le lendemain, toujours paroisse Saint-Ferreol, à l'âge de 75 ans. Ses parents se sont mariés le 4 octobre 1682 à Marseille, paroisse Saint-Martin. Jean Antoine ROUIT est fils d'Honnoré ROUIT et de Catherine FERAUDE, du tout petit village du Vernet dans les Alpes-de-Haute-Provence. 

En Guadeloupe, le nom est devenu ROUIL. Il est d'abord représenté par les soeurs de Victor Amédée Marcellin ROUIL (1753-1823), toutes natives de Marseille et dont l'aînée, Marie Elizabeth ROÜIL, née le 10 mai 1750, se marie le 16 avril 1771 au Gosier avec Jean Baptiste LAPRADE, veuf de Marie Louise BLANCHARD, originaire de Toulouse.

Le 20 juin 1774, Georges LAPRADE, fils du précédent et de sa première épouse, contracte union avec une autre soeur, Elizabeth ROÜIL, née le 28 mai 1755. Plus tard, c'est leur soeur Marguerite ROÜIL, marchande, née le 23 mai 1755, veuve de Léandre NALLIEN (mariage à Marseille, paroisse Saint-Ferreol, le 8 juin 1782), qui contracte union à Pointe-à-Pitre le 21 avril 1789  avec Jacques Alexis PERRARD, marchand horloger, natif d'Aix-en-Provence.

Une autre soeur Marie ROÜIL, née le 3 octobre 1753, est restée célibataire tandis que Marie Elizabeth ROÜIL s'est remariée (sépulture de Jean Baptiste LAPRADE au Gosier le 30 septembre 1777), à une date inconnue mais antérieure à l'été 1784, avec Nicolas BOURSOY. Leur mère, Elizabeth BERNE qui vivait encore à Marseille en 1782 (elle est dite ne savoir écrire au mariage de sa fille Marguerite ROÜIT) est décédée le 16 décembre 1791 et inhumée dans le cimetière paroissial à Pointe-à-Pitre le lendemain.

En résumé, Marcellin ROÜIT (Marseille vers 1690 - Marseille 1759), négociant, et Elizabeth BERNE (Barjols 1726 - Pointe-à-Pitre 1791), mariés en 1750, eurent cinq enfants, tous passés en Guadeloupe : 

- Marie Elizabeth ROÜIT puis ROÜIL (1750-1823), épouse Jean Baptiste LAPRADE puis Nicolas BOURSOY.
- Susanne Marguerite ROÜIT puis ROÜIL (1752 - 1820), épouse Léandre NALLIEN puis Jacques Alexis PIERRARD.
- Marie Anne François ROÜIT puis ROÜIL (1753-1824), célibataire.
- Marguerite Elizabeth ROÜIT puis ROÜIL (1755), épouse Georges LAPRADE.
- Victor Amédée Marcellin ROÜIT puis ROÜIL (1757-1823), époux Marie Françoise BOULAY.

Il y a un mariage relatif à la famille ROUIL à la Désirade. Le 22 juillet 1845, le sieur Sissi, 21 ans, charpentier, natif des Abymes, y épouse Elisabeth MIRRE, 16 ans, couturière, native de l'île. Fils de la demoiselle Scholastique, propriétaire aux Abymes, Il y a été affranchi par un arrêté du gouverneur du 19 septembre 1834 avec son frère Eugène. Ils y sont reconnus, ainsi que deux autres frères, le 29 octobre 1849 par Victor ROUIL, 48 ans, propriétaire.

Edouard Victor dit ROUIL est décédé aux Abymes le 21 mai 1856, célibataire et sans profession. Il y est né le 18 septembre 1805, fils de Marie Joseph Lucile DIEULARD (selon acte du 19 mai 1826 à Pointe-à-Pitre). Celle-ci est la fille de Marie Françoise BOULAY et de son premier conjoint, Pierre DIEULARD. Elle est décédée le 28 août 1812 sur l'habitation du sieur ROUIL aux Abymes, laissant plusieurs enfants naturels. Marcellin ROUIL était donc son beau-père mais c'est son patronyme que sa descendance adopte. 

Marie Françoise ROUIL figure sur la base Repairs car elle a touché l'indemnité en tant qu'ancienne propriétaire d'esclaves. Le site estime qu'elle a possédé entre sept et huit esclaves. Le recensement nous permet de savoir qu'elle avait alors huit esclaves auxquels s'est rajoutée une petite fille, née vers février ou mars 1848. Ce sont:

- Pauline, 22 ans, qui est noire. Inscrite comme nouvelle libre le 9 septembre 1848 sous le nom DELTA. On apprend alors qu'elle est native de la Désirade.
- Eliza, 25 ans, aussi noire, mère de Polcida, 6 mois. Inscrites comme nouvelles libres le 1er septembre 1848 sous le nom ANCENIS, en même temps que Paul ANCENIS, le père de l'enfant. Elle est née en Afrique, tout comme son compagnon.
- Lizette, 30 ans, et son fils Jules, 1 an, tous deux noirs. Lizette est dite infirme. Inscrits comme nouveaux libres le 4 septembre 1848 sous le nom BAUGY. Elle est native du Gosier et son fils de Pointe-à-Pitre.
- Rosélie et Hélène, 42 et 12 ans, toutes deux noires. Inscrites  comme nouvelles libres le 11 septembre 1848 sous le nom EPINAL. Elle est née à la Désirade et l'enfant à Pointe-à-Pitre. A noter que le 26 septembre 1848 est enregistré Damien EPINAL, 26 ans, natif de la Désirade.
Sans oublier Henriette et Annicette LOURI qui sont les seules à être dites rouges, c'est à dire métissées.

Le mot "domestiques" figure en longueur dans la  case emploi. On peut supposer qu'il s'applique au moins à toutes les femmes adultes (à l'exception peut-être de Lizette en raison de son handicap dont la nature est inconnue) et à la jeune fille. C'est une grande maisonnée pour une si petite famille. Je me demande à quelle activité commerciale se livrait Marie Françoise ROUIL.

Quelle pouvait être la raison installation des soeurs LOURI à la Désirade et à quel âge y sont elles arrivées ? D'habitude, j'observe le mouvement de migration inverse. Des natifs de la Désirade, nouveaux libres ou non, s'établissent sur la Grande-Terre et en particulier à Pointe-à-Pitre dans la période post-abolition.

On aurait pu envisager une arrivée sur l'île des deux orphelines sous la protection soit de Louise DELTA soit de Rosélie EPINAL, l'une et l'autre étant natives de la Désirade. Cependant, Pauline DELTA est restée à Pointe-à-Pitre où elle donne naissance à des enfants au moins en 1849, 1850 et 1856. Issu de sa cohabitation avec Jacques PAPOUL, 26 ans, journalier, son fils André PAPOUL y voit le jour le 20 mars 1856, maison de la dame Eugène ROMUALD. Louise DELTA, servante, travaille donc à cette époque pour la fille de son ancienne maîtresse.

En ce qui concerne la famille EPINAL, je sais qu'Hélène EPINAL est cultivatrice au Gosier en 1852 (naissance et décès de sa fille Hermantine, fille naturelle reconnue de Pierre Charles HELDON, née le 15 février et décédée le 17 décembre 1852). En 1858 et 1859, elle est lessivière à Pointe-à-Pitre (naissance et décès de sa fille Marie Léontine EPINAL, née le 20 février 1858 et décédée le 22 mai 1859).

Le 23 janvier 1860, elle épouse à Pointe-à-Pitre Paul FERCHO, 31 ans, matelot gabarrier, natif du Lamentin. Elle est revendeuse et, comme sa mère (cette dernière sans profession), est domiciliée dans la ville. Le 18 février 1862, elle y donne naissance à Eulalie Délia FERCHO. 

Hélène EPINAL, revendeuse, veuve de Paul FERCHO (mort le 8 septembre 1876), décède chez sa mère, boulevard Faidherbe, où elle demeurait, le 1er août 1888. Leur fille Eulalie Délia FERCHO meurt le 2 août de l'année suivante à l'Hôtel-Dieu où elle était entrée le 26 juin. 

Pour Damien EPINAL, je sais seulement qu'il épouse Honorine TUDOR le 23 septembre 1852 aux Abymes (tous les deux sont cultivateurs) et y décède le 8 juin 1888. Je n'ai malheureusement aucun élément qui permette d'établir sa probable parenté avec Rosélie EPINAL. 

La relation d'Annicette LOURI avec Janvier ZODIA, marin né à la Désirade, est-elle suffisante pour expliquer l'arrivée des deux soeurs sur l'île ? On peut tout autant spéculer que c'est leur présence sur l'île qui a conduit à cette relation. Y-avaient-elles de la famille ? 

L'absence de registres des esclaves de Pointe-à-Pitre pour la période nous empêche de connaître l'identité de la mère d'An(n)icette et Henriette et l'année exacte de naissance. Il y a un décalage entre les âges portés au recensements et ceux donnés dans d'autres actes. 

Les numéros matricules donnés dans le recensement sont 5974 et 5975 et ceux du registre des nouveaux libres 5474 et 5975. Je débute donc par celui qui est identique dans les deux documents. Si l'âge d'Henriette est correct dans le recensement, elle serait née vers 1844 mais l'état civil la fait plutôt naître vers 1847. 

Dans l'article précédent, j'évoquais l'exemple de Marie Louisia ANTIBES pour tenter d'établir une date d'inscription sur le registre matricule de Pointe-à-Pitre. Nouvelle libre de la ville dont elle est native, celle-ci est inscrite le 1er septembre 1848, ayant eu le numéro matricule 5802 et étant âgée de 2 ans, (sa mère a un numéro totalement différent, ce qui va dans le sens d'un numéro attribué à la naissance de l'enfant). Marie Louisia ANTIBES est décédée le 23 décembre 1858, âgée de 12 ans, ce qui la ferait naître vers 1846, voire vers 1847.

Nouvel exemple, celui de Louisia LORNAY, native de Pointe-à-Pitre, numéro matricule 6200, inscrite le 9 février 1849 en tant que nouvelle libre à l'âge de 3 ans (même remarque que ci-dessus sur le numéro matricule de sa mère). Louisia LORNAY a donc vu le jour vers 1846. 

Je reprends un autre exemple d'une recherche plus lointaine. Alcide SOMMIERES, natif de Pointe-à-Pitre, numéro matricule 5955, inscrit le 24 octobre 1848 en tant que nouveau libre, à l'âge de 2 ans (même remarque que ci-dessus sur le numéro matricule de la mère). La naissance d'Alcide SOMMIERES se situe donc vers 1846. D'après ces trois exemples, Henriette LOURI serait vraisemblablement née ou du moins aurait été enregistrée aux environs de 1846. 

Si le numéro matricule d'An(n)icette est bien le 5474, il me suffit de reprendre les trois exemples évoqués à la fin de la notice sur la fratrie PRISTAL, lesquels indiquent que ce numéro matricule est attribué vers 1845. Comme pour sa soeur, cette année correspond à ce qui pouvait être déduit des actes d'état civil. 

Si je me basais sur les âges donnés sur le registre des nouveaux libres le 20 janvier 1855, Anicette serait née vers 1845 et Henriette vers 1843, tandis que d'après le recensement de 1847 (la fiche est datée du 1er octobre), Henriette est née vers 1842 et Anicette vers 1844 ? A moins de trouver un autre source, comme un acte notarié, la situation reste confuse, d'autant plus que même l'ordre de naissance se retrouve inversé par rapport à l'état civil.

En résumé, les deux enfants sont des soeurs et natives de Pointe-à-Pitre, elles sont nées à environ deux ans d'écart l'une de l'autre, dans un ordre toujours à déterminer, d'une mère inconnue (et apparemment déjà décédée au moment du recensement), et ont habité quelque temps l'île de la Désirade. Le (sur)nom qu'elles portent en 1847 et qui devient leur patronyme officiel est l'anagramme de celui de leur maîtresse. Impossible de déterminer la raison de ce choix qui pourrait autant résulter d'une parenté quelconque (on sait que les fillettes sont métissées) que d'une forme de contrôle ou de faveur. A la Désirade, nous avons les EVUORT, ainsi nommés à partir du nom de la demoiselle TROUVÉ, personnalité de l'île, propriétaire d'une grosse habitation et de nombreux esclaves.

 

COPYRIGHT DAVID QUENHERVE

Retour à l'accueil
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article