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Généalogie à la Désirade (Guadeloupe)

L'attaque anglaise sur la Désirade en l'an VII

Récit fait par Jean Baptiste FORMY. Avertissement, certains propos tenus sont choquants.

N° 1

 

An 7

 

Notes des Combats que Jean Baptiste FORMY Chef d'Escadron de Gendarmerie a eu avec les Anglais aux Isles du Vent, Guadeloupe, Principalement à L'Isle de la Désirade, Sous les ordres du Général DESFOURNEAUX.

Les déclarations qui les attestent Sont en Dépôt dans les Bureaux de la Marine et des Colonies.

Présentées à son excellence le Grand-Chancelier de la Légion d'honneur.

 

Depuis le Commencement de la guerre actuelle, les Anglais s'emblent S'être toujours attachés Scrupuleusement à leur Système Mercantille de ruiner la france, en détruisant Son commerce. c'est dans ces vues qu'ils paraissent avoir porté la révolte et la destruction à St Domingue et S'être emparé des Isles du Vent,

Des miracles de Bravoure nous firent reprendre la Guadeloupe; mais Sous le Gouvernement de Victor HUGUES, trop attaché à un parti qui ne connaissoit que les extrêmes, cette colonie ne pouvoit pas faire de grands progrès vers le bon ordre et lagriCulture. Les Agents du Gouvernement ne pouvant douter que Son extrême sévérité ne lui alienât presque tous les Chefs de L'armée, beaucoup des habitans du pays et même Ses collégues voulurent Se faire un rempart des noirs qu'il arma en trop grand nombre. Cette mesure eut le double inconvénient de diminuer les bras employés à la culture et de ralentir lardeur de ceux qui y restèrent attaché.

Enfin parut le Général DESFOURNEAUX vers le Commencement de L'an 7. Ses principes, sans être opposés à ceux de Victor HUGUES, étoient infiniment plus modérés et bien plus faits pour porter la …/....

 

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consolation et la confiance dans le cœur des Propriétaires de la Colonie qui étoient déjà relativement aux noirs, ce qu'étoient autrefois les blancs relativement aux mulatres. En quelques mois tout changea de face. L'Agriculture fut encouragée et les produits portés presque au triple des années précédentes. Le Commerce fut Vivifié. les Propriétaires que la crainte d'une destruction presque inévitable, sous le Prédécesseur du dit Général, avoit forcé de se réfugier dans les Isles neutres Voisines, furent rappellés.

Une bonne police rurale garantissait la Sureté de la caste Européenne et l'assiduité des noirs à Leurs travaux, tout paraissoit heureux; mais ce bonheur faisait le Supplice des méchants et de quelques bas intriguants que le Général DESFOURNAUX, se reposant trop sur le bien qu'il faisait, avoit négligé de Déporter comme des êtres dangereux, Ces hommes là avaient conservé leur influence sur les noirs. Ils leur firent entendre que le Nouvel Agent exigeoit d'eux, plus de travail que son prédécesseur. Et pour les négres naturellement paresseux, le travail est le nec le plus ultra de la tyrannie. Aussi fut-il très aisé de leur faire croire que le Général DESFOURNAUX en exigeant leur présence sur les atteliers avoit attenté à leur Liberté et que par consêquent il étoit d'accord avec les Anglais pour les ramener à l'esclavage. C'est sous ce pretexte aussi odieux que ridicule que le brave général fut arrêté et déporté, Je le fus également comme attaché à Ses principes et pour avoir refusé de me prêter à une basse calomnie en Signant l'accusation outrageante qu'on avoit dressée contre lui.

Mais ce qui Sans doute paraitrait infiniment absurde, c'est que le Général DESFOURNAUX fut arrêté comme Suspect de S'être vendu aux Anglais et que moi Son complice fut sur le point d'être condamné à mort par les révoltés de la Guadeloupe, pour avoir traité ces mêmes Anglais avec trop de cruauté. Comme j'ai été Sérieusement accusé par eux auprès du Gouvernement français, que Sous ce prétexte, j'ai été outragé, incarceré et pillé de tout ce que je possédois, puisqu'ils m'enlevèrent même dans cette circonstance tous mes papiers propres …/...

 

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à établir mon Service militaire; Tels qu'un Brevet de Sous Lieutenant donné par le Comte DESTAING, trois autres de Lieutenant, Capitaine et prévôt de Maréchaussée, à St Domingue, lesquels n'avoient été accordés par le Général DUCHILLAU, alors Gouverneur de cette Isle, une Commission de Chef d'Escadron de Gendarmerie donnée par le Cen POLVEREL Commissaire civil à St Domingue. en revenant de la Guadeloupe à St Thomas pour me procurer un passage, afin de me rendre en france, j'ai été pris par un bâtiment Tortolien Anglais qui m'a pillé tout ce que j'avais, tel que mes papiers parmi lesquels était un Brevet, me conduisit à Tortole, où je suis resté huit jours prisonnier, de là, je me suis rendu à St Thomas, afin de me procurer les moyens de passer en france.

Je me trouvais réduit à la nécessité de me justifier d'avoir fait une très bonne action. le simple reçit des faits suffira pour S'en convaincre. Je vous prie, Monseigneur, de le lire Sans impatience, je Serai aussi succint que possible.

Les Anglais qui nous accusent de Barbarie, ont commis eux mêmes par tout où ils ont été les plus grandes horreurs. Ils n'ont régné aux Isles du Vent que par la terreur. à Ste Lucie ils ont pendu par Centaines les français Propriétaires, Vieillards et pères de famille. à la Dominique ils les ont fait mourir dans des cages de fer. Ces scènes douloureuses ont été repetées dans d'autres Isles. Ces détails sont inutiles ici; mais ce qui ne doit pas être oublié c'est que par une proclamation répandue avec profusion, ils annonçoient aux habitans de la Désirade où je commandois au mois de messidor an 7, qu'ils venoient avec des forces qui ôtoient toute idée de résistance, Pour traiter avec la même cruauté tout ce qui etoit en état de porter les armes. Sa Majesté Britannique, disoient-ils ne peut traiter différement avec des revoltés.../...

 

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Les habitants de la Désirade n'eurent pas de peine à le croire, puisque déjà en pareille occasion, huit peres de famille de cette petite Isle avaient été pendus par les Anglais.

En effet le 10 messidor, les Anglais se presentent devant la Grande Anse, avec un Vaisseau de Ligne et une frégate. Leurs chaloupes débarquent huit Cent hommes de troupe de ligne, et Sur le champ ils s'avancent pour prendre poste dans L'intérieur de L'Isle. Il était huit heures du soir, Je Soupois tranquilement avec ma famille à quelque distance delà, dans la plus parfaite Sécurité, ignorant absolument ce qui Se passoit. Que L'on juge de ma Surprise lorsque trois Citoyens entrent pour m'annoncer que les Anglais ont débarqué; qu'ils ont répandu une proclamation faite pour porter la terreur dans L'âme des habitans; que la Batterie, dite Sans-culotte, qui commanden le Gouvernement que j'habitois, étoit déjà au pouvoir des noirs révoltés, armés par les ennemis; et que j'allais être foudroyé par leurs canons et enseveli avec ma famille sous les ruines de ma maison. Ce n'etoit pas le moment de délibérer. Je n'avais avec moi que mon Sécrétaire, Vieillard peu propre à la guerre et les trois citoyens qui étoient venus m'avertir, « Amis, leur dis-je, il faut ici une mort Glorieuse, ou demain à L'échafaud, laissons pleurer nos femmes et marchons à l'ennemi. Je cours aussitôt à la batterie. Je Commandais à des français je m'inquiétais pas du nombre, A dix pas trente coups de fusil partent Sur nous : mon plumet fut emporté et nos habits criblés de balles, aucun de mes braves ne fut blessé, L'arme blanche décida bientôt du Combat. J'en Sabrai Sept, Anglais L'ennemit s'entétoit à enfoncer la porte de la poudriére au lieu de Se défendre. Ils Se reposoient mutuellement Sur le nombre et c'est sur cette même porte qu'une grande partie reçut la mort.

En entrant dans la Batterie j'avois feint d'être Suivi de beaucoup de monde. Je donnais des ordres à haute Voix, cette ruse Vraisemblablement ne contribua par peu à mettre l'ennemi en fuite,

Il s'agissoit alors de réunir sur un même point – toutes les forces de notre petite Isle pour marcher à l'endroit.../...

 

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ou l'ennemi avoit débarqué; mais je n'avois personne pour porter mes ordres; l'orsque mon fils, jeune enfant de dix ans S'offrit pour aller à cheval aux Galettes pour ramener Sept hommes d'Artillerie, Seule troupe de ligne que j'avois alors dedans L'Isle et avertir les habitans de se réunir à L'instant sous mes ordres. Ne pouvant garder la batterie Sans culotte et me voyant dans la nécessité de marcher sur un ennemi infiniment supérieur en nombre, je fis jetter les pièces de canon hors de la Barbette. Je croyois alors n'avoir affaire qu'a un tres petit nombre d'Anglois Armés Seulement de fusils; mais en retournant chez moi, j'y trouvai un nombre considérable de femmes et d'enfants qui jettoient des cris épouvantables et qui m'apprirent; que les Anglois étoient plus nombreux que je le croyois; qu'ils avoient débarqué de L'artillerie, que depuis longtems, ils avoient entretenu des intelligences dans L'Isle; que tous les noirs étoient insurgés qu'ils étoient bien armés et campés sur le morne à Papaye ; enfin que les Anglois marchoient en bon ordre vers la montâgne pour faire leur jonction avec les révoltés. Nouvel embaras dans moins d'une heure néanmoins je fus rejoint par mes Artilleurs et par deux Cent Ving huit hommes de Garde nationale. J'avois à combattre avec ce peu de monde huit Cents hommes de troupe de ligne et Onze Cents négres. Il n'y avoit point de tems à perdre, je pris sur le champ mon parti. J'étois craint et respecté des noirs. Je savois qu'ils me regardoient comme un Chef humain et Généreux et comme un Militaire inflexible qui ne feroit aucune grâce à des revoltés. Je voulus encore les empêcher de connoitre le mouvement de l'ennemi et profiter de l'obscurité afin de les jetter dans une erreur utile et leur ôter les moyens de faire une diversion que dans ce moment nous eut tous perdus. Je leur envoyai dire que je marchois Sur eux , que les Anglois étoient déjà en fuite, que je je ferois grâce à ceux qui auroient empêché l'assinat des blancs, ou de leurs femmes qui pouvoient être dans la campagne; mais que si un Seul étoit tué je les massacrerois tous Sans miséricorde. Alors je me mis à la tâte de .../...

 

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de ceux qui m'avoient rejoint, je leur Parlai des cruautés que les Anglois exerçoient partout où ils étoient, decelles dont ils avoient déjà été les témoins, de la mort ignominieuse qui les attendoit S'ils ne se montroient pas comme de braves français et je leur rappelai qu'un bataillon avoit chassé plus de Quinze mille Anglois à la Guadeloupe.

Pour Parvenir au camp de la Papaye, l'ennemi étoit forcé de passer un défilé, où il lui étoit impossible de maneuvrer; S'ils y étoient attaqués. Il S'agissoit d'y arriver avant lui et nous en eumes le bonheur. Je disposai mon monde de manière, à ce que notre feu fit plus d'effet, et afin que l'ennemi ne put y répondre avec Succès et pour que sa confusion ne nous fit pas entre-tuer. J avois donné des ordres pourque l'on gardât le plus profond silence et que l'on ne tirât qu'au Signal que je donnerais moi-même. L'ennemi parut bientôt. Il croyoit nous trouver endormis il marchoit sans précaution et dans le plus grande confiance. Je les laissai avancer jusqu'à l'extrémité de L'Embuscade. tout à coup je donnois le Signal les Balles pleuvoient Sur eux comme la grelle. on les tiroit à dix pas et chaque coup portoit. Rien ne peut peindre la confusion et la terreur ou se trouva l'ennemi dès les premières décharges. Notre feu étoit rapide et bien nourri et la peur augmentant notre nombre à leur imagination. ils se crurent trahis par les noirs. Ils pensèrent avoir Seur eux toutes les forces de la Guadeloupe. Sans Songer à se défendre, ils essayèrent de maneuvrer pour faire retraite; mais resserés entre deux Montagnes, ne pouvant marcher de front et attaqués vivement de tous côtés, ils Se regardoient avec désespoire comme dévoués à une mort certaine. Ce ne fut bientôt qu'une déroute complette. Ils abandonnèrent leurs armes, leurs canons, leurs Drapeaux et quantité de bagage inutile qu'ils portaient avec eux, pour rejoindre, le bord de la mer. mais tout étoit prévu on les attendoient à l'entrée du défilé. ils …/...

 

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n'échapèrent , à la première Embuscade que pour être rejettés dans une autre ou étant en désordre on en fit un carnage horrible. Enfin ils furent poursuivis, jusqu'à leur chaloupes, la bayonnette dans les reins.

Ils perdirent dans ces deux combats qui n'en furent qu'un, 390 hommes, 2 pièces de canon, 133 Sabres, 590 fusils, 2 Drapeaux, 2 Coffrets, 2 Caissons remplis de Gargouches et de cartouches. Nous n'eumes que cinq hommes de blessé.

Malheureusement pendant que j'étois à la porsuite de L'ennemi ; quelques noirs de ceux qui m'avoient suivit restèrent pour piller les morts et comme ils sont cruels toujours hors de la présence de leur chefs. Ils tuerent les blessés. C'est cette cruauté qui a servi de prétexte à mon arrestation, comme si on Pouvoit m'imputer une Sévérité à laquelle je Suis étrangé, comme si les Anglois nous ayant déclaré une guerre à mort en débarquant et nous ayant dévoué à L'échafaud, on ne pouvoit pas au fond regarder leur mort comme répressaille justement méritée.

Après avoir chassé les Anglais nous marchâmes aussitôt Sur les noirs révoltés, leur camp fut enlevé à la bayonnette, Je leur fis mettre bas les armes et après avoir exigé que les chefs me fussent livrés et le serment de fidélité à la République une amitié générale fut proclamée. Leurs chefs scélérats reconnus dès avant la révolution furent traduits devant une commission Militaire qui les condamna à la peine de mort. Ce juste punition m'a encore été reprochée, parce qu'il falloit à des révoltés de pareil pretextes pour justifier d'autres révoltés.

Monseigneur, Je ne vous presente que des faits pour attester que m'a conduite fut toujours irréprochable. J'ai pensé qu'un militaire doit plustôt opposer, à ses ennemis, Ses actions, que …/...

 

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des raisons qu'ils ont prennent, dans la résolution de ne pas entendre, quand ils ont besoin d'accuser.

Nous avons trouvé dans le camp des Négres révoltés , 990 fusils, à peu près autant de sabres, 2 pierriers d'une livre de balle, environ 2,000 paquets de cartouches et un Pavillon Anglois.

Mes ennemis m'ont ruiné, je ne sais encore quel avenir le Destin me préparer ; mais je sais bien que je preferrai toujours à la condition d'être malheureux avec honneur, à celle d'être heureux avec infamie./.

 

je Sertie le present Sinser et veritable         formy

 

[cette ligne est de la main de Jean Baptiste FORMY]

 

COPYRIGHT DAVID QUENEHERVE

 

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V
Incroyable, je découvre cette histoire, Mais qu'elle est la suite ?
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